Foires aux questions

Voici quelques réponses aux questions qui m’ont été le plus souvent posées par les lecteurs, soit par courriel, soit dans les Salons du livre, soit à l’occasion de rencontres fortuites. Pour des réponses plus élaborées, le lecteur peut se référer à Questions d’écriture. Tout ce livre a été élaboré à partir de questions des lecteurs, regroupées par thèmes. On y trouvera des réponses aux quelques questions apparaissant ci-dessous ainsi qu’à de nombreuses autres.

 

Quelles sont vos sources d’inspiration ?

J’ai l’habitude de répondre que c’est le Téléjournal… ce qui n’est pas faux, mais dans un sens général.

En fait, c’est l’habitude que j’ai de suivre les informations. Et pas seulement les informations politiques ou économiques, mais également l’actualité scientifique et artistique. Les romans me donnent l’occasion de faire quelque chose de tout ce que je lis, entend à la radio ou regarde à la télé… On pourrait dire que c’est pour moi une façon de lutter contre le morcellement de l’information auquel on est de plus en plus confronté.

Il y a par ailleurs une autre forme d’inspiration qui est moins évidente: c’est la sensibilité particulière que possède chaque personne, moi comme les autres, à certaines situations difficiles (violences, injustices…). Je suis persuadé que la fiction nous sert à exorciser, du moins en partie, les situations qui nous dérangent le plus. Il y a un plaisir à retrouver ces situations mises en scène dans un univers imaginaire, où il paraît possible, sinon de les contrôler, du moins de les comprendre un peu mieux.

C’est en ce sens qu’un roman en révèle habituellement davantage sur un auteur que ce qu’il est conscient d’y avoir mis.

 

Comment procédez-vous pour écrire un roman ?

Je commence par un schéma de trois ou quatre pages, où je détermine les grandes étapes du roman ainsi que les principaux personnages.

Je fais ensuite une version plus développée d’une vingtaine de pages où je précise davantage le développement de l’histoire ainsi que les nouveaux personnages.

Je fais ensuite, pour chaque journée, une description rapide du contenu de chacune des scènes, avec parfois quelques répliques. Pour le Bien des autres, à cette étape, j’avais un plan détaillé d’environ 250 pages.

Je suis alors prêt à écrire. Je commence par rédiger chaque scène, dans l’ordre où elles apparaissent dans le plan.

En rédigeant, il me vient des tas d’idées qui impliquent des événements antérieurs ou postérieurs qui n’ont pas été prévus dans le plan détaillé. Je les note dans le plan comme ajustements à faire ou comme nouvelles scènes à écrire. Parfois, ce sont des scènes ou des passages à supprimer… Tout cela peut rapidement devenir très complexe, dans la mesure où j’utilise le plan détaillé uniquement comme un canevas de base.

Par ailleurs, à l’étape du plan, je note généralement peu de choses sur les personnages principaux, ce qui, au moment de l’écriture, me laisse le plaisir de les découvrir. Il en est de même pour les personnages secondaires, dont j’invente le nom et les aspects biographiques au moment de la rédaction — ce qui transforme certaines scènes (ou l’introduction de certaines scènes) en mini nouvelles.

Une fois la rédaction manuscrite achevée, j’entre le texte à l’ordinateur, ce qui est l’occasion de revoir de façon importante l’écriture, d’introduire de nouvelles scènes, d’en supprimer d’autres, d’en fusionner, d’en couper certaines en plusieurs parties, de les déplacer… C’est une étape où dominent l’ajustement du texte et le montage de la narration. Une étape que je recommence à plusieurs reprises. À chaque nouvelle réécriture, l’accent se déplace un peu plus du développement de l’histoire à l’épuration de l’écriture et du dialogue.

 

D’où vous est venue l’idée des Gestionnaires de l’apocalypse ?

Pendant la préparation de La Chair disparue, je me suis rendu compte que je n’avais pas, dans un seul roman, l’espace nécessaire pour aborder tous les thèmes et tous les personnages qui m’intéressaient. J’ai alors choisi de consacrer un roman à chacun des quatre niveaux de manipulation que je voulais aborder: le corps, l’individu, le groupe social et l’humanité.

Par contre, par la présence de l’Institut et du Consortium dans chacun des romans, je pouvais étendre à l’ensemble de la série le thème des enjeux mondiaux. Dans le premier roman, la mondialisation semble très axée sur celle des mafias; puis progressivement, d’autres problèmes sont abordés: la possibilité d’une utilisation responsable de l’argent, les phénomènes de croyance, la destruction de la planète…

 

Comment expliquez-vous que plusieurs des événements imaginaires que vous avez décrits se sont ensuite produits ?

L’exemple le plus connu est le passage de L’Argent du monde, publié en mars 2001, où je fais dire à un personnage: «Il vaut mieux prendre nos distances avec ben Laden. Il commence à devenir trop voyant.»

D’abord une précision: ce n’était pas une «prédiction» de ce qui s’est passé le 11 septembre. C’était simplement le constat, assez facile à faire à l’époque, que ben Laden apparaissait de plus en plus lié au terrorisme. Évidemment, ça ne faisait pas la une des médias nord-américains. Surtout que l’essentiel de sa formation lui avait été donnée par les Américains…

Ensuite, il y a le fait que, dans mes romans, un de mes principaux objectifs est d’illustrer les effets, dans la réalité sociale et dans celle des individus, de certaines logiques de pouvoir, de certains discours collectifs. Il n’est donc pas si étonnant qu’il finisse par se passer dans la réalité des événements assez semblables à ceux que j’imagine, puisque ces derniers sont des illustrations des mêmes logiques, des mêmes discours.

 

Pourquoi mettez-vous en scène autant de personnages qui souffrent de problèmes physiques ou psychologiques (eczéma, syndrome des yeux de chat, personnalité multiple, syndrome de Gilles de la Tourette…) ?

Je n’ai pas de réponse claire à cette question. C’est une caractéristique qu’on retrouve dès les premiers romans… Au départ, cela résultait en grande partie des choix intuitifs, peu conscients, qui se font pendant le travail d’écriture. Puis, d’un roman à l’autre, j’ai remarqué que ces différentes maladies ou mutilations ont comme point commun d’être des atteintes à l’intégrité physique ou psychologique d’une personne — ce qui s’apparente au thème du morcellement, lequel est présent partout dans les romans, à la fois dans la forme de l’écriture et dans le contenu narratif.

 

Dans les romans des Gestionnaires, vous avez toujours des extraits d’un essai qui sont intégrés au roman. Ces essais existent-ils réellement ? Les écrivez-vous avant, pendant ou après vos romans ?

Ces essais sont écrits en même temps que le roman. Celui de La Chair disparue n’existe que sous forme d’extraits. Ceux de L’Argent du monde et du Bien des autres ont été écrits en entier, puis découpés, expurgés et reformulés sous forme d’extraits.

 

Dans les critiques et commentaires sur vos romans, on soulève rarement l’humour qui s’y trouve. Pourquoi, pensez-vous ?

Je ne sais pas. C’est un fait qu’on souligne rarement leur dimension humoristique et satirique. Il en va de même pour leur côté politique, d’ailleurs… C’est peut-être à cause des sujets abordés: ce sont souvent des sujets qui dérangent. Par ailleurs, il est arrivé à plusieurs reprises que des choses assez semblables à celles que j’ai décrites dans les romans se soient produites. Ça pourrait expliquer pourquoi, dans les entrevues, on me pose des questions presque uniquement sur les sujets abordés, et très peu sur les romans eux-mêmes, sur leur ton, sur leur écriture…

 

Pourquoi s’est il passé autant de temps entre la sortie de vos derniers romans ?

Probablement parce qu’ils sont longs!… Plus sérieusement, entre Blunt et La Chair disparue, puis entre La Chair disparue et L’Argent du monde, il y a eu environ deux ans. Ces trois romans représentent plus de deux mille pages. Je ne trouve pas ça particulièrement lent comme rythme d’écriture.

Et puis, il y a un autre facteur qui joue: la complexité des intrigues et les nombreuses références à de multiples champs de spécialisation. Il est possible (probable?) qu’écrire un roman intimiste de 150 – 200 pages serait moins long!

Par contre, pour La Faim de la terre, le délai fut clairement plus long. Il y a à cela deux raisons. La première raison, c’est que d’autres projets ont accaparé une grande partie de mon temps. Il y a aussi le fait que La Faim de la terre fut un roman plus compliqué à écrire du fait que c’était le dernier de la série, que la dimension planétaire y est plus présente et que j’ai du m’assurer de boucler (presque) tout ce qui a été amorcé dans les trois précédents.

Pour Les Visages de l’Humanité, il y a eu de nouveau un délai de trois ans. La raison en est que j’ai préparé en parallèle les trois essais sur la montée aux extrêmes. Les quatre livres ont paru ou vont paraître sur une période de 12 mois, ce qui est quand même assez rapide comme rythme de publication.

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